Psychanalyse et idéologie

Jacques Sédat • On ne supporte plus le malheur

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Il est plus facile d’élever un temple que d’y faire descendre l’objet du culte

Samuel Beckett • « L’Innommable »

Cité en exergue au « Jargon der Eigentlichkeit » par T. W. Adorno • 1964

It is easier to raise a temple than to bring down there the worship object

Samuel Beckett  « The Unspeakable one »

Underlined in « Jargon of the authenticity » by T. W. Adorno • 1964

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Personne n’a le droit de rester silencieux s’il sait que quelque chose de mal se fait quelque part. Ni le sexe ou l’âge, ni la religion ou le parti politique ne peuvent être une excuse.

Nobody has the right to remain quiet if he knows that something of evil is made somewhere. Neither the sex or the age, nor the religion or the political party can be an excuse.

Bertha Pappenheim

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ψ  = psi grec, résumé de Ps ychanalyse et i déologie. Le NON de ψ [Psi] LE TEMPS DU NON s’adresse à l’idéologie qui, quand elle prend sa source dans l’ignorance délibérée, est l’antonyme de la réflexion, de la raison, de l’intelligence.

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« On ne supporte plus le malheur»

Jacques Sédat, psychanalyste, auteur de La Première analyse d’hystérique (éd. ψ  [Psi] • LE TEMPS DU NON), et de Freud (Armand Colin).

« Actuellement, l’idéologie de l’estime de soi se révèle très entrepreneuriale et liée au culte de la performance.

L’estime de soi n’est plus tant l’estime de soi-même que l’image qu’on doit en donner aux autres.

Donc, il faut être performant physiquement, sexuellement, socialement, à la maison, au travail, partout, tout le temps. Il s’agit de colmater la moindre faille en écartant d’un revers de main tous les éléments contingents de l’existence - séparation, échec, deuil - devant lesquels cette performance cesse. On vous demande d’être blindé et apathique au sens des stoïciens, c’est-à-dire en inhibant toute sensibilité.

Autrefois, les conditions socio-économiques faisaient que la majorité des gens tentaient de subsister, pas de vivre pleinement. Aujourd’hui, les modèles élitistes s’adressent à tout le monde alors même que les individus sont très malmenés socialement.

On ne supporte plus le malheur. Un seul statut, l’homme sain, bien portant, au moral d’acier, et tout le reste - enfant handicapé, vieillard, chômeur, faible - est mis à l’écart, pathologisé. J’entends les gens se féliciter d’avoir “vite fait un bon deuil”. Il faut faire le “bon” deuil et le faire “vite”. Deux paramètres qui escamotent le travail psychique. Pour le psychanalyste l’estime de soi relève du mot allemand Selbstgefühl, la capacité de se ressentir soi-même.

Il y a une dimension affective que l’on ne retrouve pas dans la définition classique française. Quand l’image de soi est défaillante, il y a tout un travail d’analyse à mettre en route pour qu’un individu revisite sa propre histoire et se dégage de tous les rôles que lui ont assignés ses proches. Construire l’estime de soi, c’est se réapproprier son histoire, acquérir la capacité d’être bien avec soi-même et gérer alors sans les nier tous les problèmes contingents qui sont le fait de l’humanité : la souffrance, la maladie, la séparation, le deuil. Rien n’est plus terrifiant que de gommer l’aléatoire, l’imprévisible. »

 

 

ψ  [Psi] • LE TEMPS DU NON
cela ne va pas sans dire
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