© Micheline Weinstein / 2 septembre 2005
Une démarche révisionniste, un article pitoyable / Lettre à Ursula Gauthier
Suite à son article dans « Le Nouvel Observateur », du 1er septembre 2005
Il y a pas loin de dix ans maintenant, j’ai résilié mon abonnement au « Nouvel Observateur », à la suite d’un article, accompagné ou non d’un dossier, je ne me souviens plus, de la même inspiration que le vôtre, dont je ne reproduirai pas le titre. Lequel rend compte d’un livre de 800 pages dont on peut se demander quel est son objectif, sinon celui d’injurier un homme, un savant et son œuvre.
Ursula Gauthier, avez-vous lu Freud ?
Dans le cas contraire, je me permets de vous reporter au Petit abrégé de psychanalyse, de Freud, que je viens de traduire, placé sur le site de notre association, et que vous trouverez ici en pièce jointe avec le début du Cours Élémentaire de psychanalyse que je rédige actuellement. Le Cours Préparatoire étant au préalable une analyse personnelle, condition impérative pour en comprendre les rudiments.
À la lecture de cette traduction, Jean Pierre Faye remarquait que, depuis plus d’un demi-siècle, le langage de Freud avait été totalement recouvert par un autre langage. Ce qui est, de la part des promoteurs de cet autre langage, là aussi, une démarche révisionniste.
Si Freud ne vous intéresse pas, pourquoi nous présentez-vous ici, via un hebdomadaire d’assez large diffusion intellectuelle, qui semblerait préférer l’idéologie de Houellebecq, rentable, porteuse, à l’éthique de Freud, votre hargne, votre transfert négatif contre la psychanalyse ?
Pourquoi ne pas garder votre haine pour vous, faire avec la vie comme bon vous semble ? Quel plaisir retirez-vous à l’exhiber dans les médias ?
Si vous êtes mal informée, pas très cultivée, si vous voulez des preuves directes, concrètes, de l’efficacité de la théorie et de la pratique analytiques, prenez avis auprès des analysant/e/s qui ont croisé et croisent par ici. Chacun/e vous répondra volontiers, à partir de son expérience propre, comparable à aucune autre. C’est vraiment tout simple.
Ursula Gauthier, savez-vous que, sans la fortune de Marie Bonaparte, en des temps bien antisémites, la psychanalyse en France n’aurait ni Institutions privées, ni Maisons Vertes pour les enfants, et départements plus ou moins universitaires, autres que junguiens, lacaniens et sectes ?
Ursula Gauthier, quel mépris pour les remarquables cliniciens et théoriciens français, depuis l’après 2e Guerre Mondiale, tels - ce sont mes références, il en est d’autres - Françoise Dolto, François Perrier.
Peut-être serez vous intéressée par la lecture du texte qu’a écrit Françoise Dolto en 1983 à ma demande, pour une conférence dont le sujet était mon désaccord avec Lacan sur sa théorie du “Stade du miroir”, à paraître ce mois-ci chez Gallimard, dans un volume qui rassemble sa Correspondance professionnelle.
Avez-vous, Ursula Gauthier, une idée du respect que chaque être humain doit à l’œuvre d’un auteur, d’un artiste, fussent-ils Juifs, que l’on soit ou non en accord avec leurs travaux. Qui aura marqué indéfectiblement l’histoire de la civilisation et dont, pour ne citer que Freud, trois sœurs ont été assassinées dans les chambres à gaz de Treblinka et d’Auschwitz ?
Les universitaires qui complètent votre dossier et illustrent votre thèse, révisionniste parce que non documentée, inculte, étayée de ragots intellomondains, de jalousies infantiles narcissiques primaires, ressemblent à de bien vieilles lunes, d’une fraîcheur contestable, apparues à notre consternation en librairie depuis 15-20 ans, pour des motifs aussi peu honnêtes que les assertions négatives sans fondement que vous avez trouvé à nous offrir aujourd’hui.
M. W.