© Cherifa Kheddar / Novembre 2010
C’était
dans la ville du Nord du pays
Un
conte moderne
par
Cherifa
Kheddar
Présidente de l’association
« Djazairouna »
des Familles Victimes du Terrorisme Islamiste
Première publication sur le site MPCT [lien] le 04 novembre 2010
Il était
une fois dans une ville du nord du pays, l’homme,
la femme et l’enfant. Ils firent un cauchemar
qui a bouleversé leur vie à jamais.
Il s’agit
de l’obligation de changer d’habitude
alimentaire, vestimentaire et comportementale
sous peine de condamnation à mort placardée
dans la mosquée du quartier.
L’homme,
la femme et l’enfant s’exécutèrent,
et changèrent de vie comme le voulait la
toute nouvelle religion imposée par la
terreur des illuminés de Dieu.
Un jour, l’homme,
la femme et l’enfant entendirent parler
de l’attentat à la bombe qui avait
eu lieu dans un cimetière de la ville de
l’ouest du pays, et qui avait fait des dizaines
de victimes parmi les enfants.
Forts de l’appui
d’un parti politique démocratique
laïque, et de l’appui de l’occident
bien pensant, l’homme, la femme et l’enfant
justifièrent l’attentat en disant
: “Vous savez les enfants victimes de
cet attentat ne sont que des dommages collatéraux,
à vrai dire, la bombe ne visait que les
autorités. Les islamistes victimes des
généraux savent ce qu’ils
font, ils ne tuent pas gratuitement.”
Le jour suivant,
une enseignante fut assassinée dans l’enceinte
de l’école, en présence de
ses élèves âgés entre
5 et 13 ans. L’homme, la femme et l’enfant
dirent : “Vous savez : l’enseignante
a refusé de porter le Foulard, donc les
islamistes savent ce qu’il font, ils ne
tuent pas gratuitement, ils n’assassinent
que ceux qui le méritent.”
Le jour suivant,
un directeur d’école primaire fut
assassiné, l’homme, la femme et l’enfant
justifièrent la sentence, et dirent que
le directeur méritait d’être
exécuté du moment qu’il avait
refusé d’appliquer la Chariaa, qui interdit clairement la mixité dans les écoles.
Le jour suivant,
un journaliste fut décapité en présence
de ses parents et de ses enfants, l’homme
la femme et l’enfant, approuvèrent
une fois de plus la sentence des “justes”,
puisqu’il s’agissait d’un Algérien
athée.
Les victimes des
autres jours aussi, méritaient d’être
éventrées, décapitées,
égorgées ou assassinées par
armes à feu, parce qu’elles étaient
proches de membres de corps constitués,
ou étrangères ou non musulmanes.
Les jours qui suivirent,
l’homme et la femme décidèrent
de prouver leur loyauté envers les “justes”,
ces illuminés de Dieu, et leur offrirent
en guise de présent, l’enfant en
mariage de jouissance.
L’enfant
refusa cette situation et profitant d’un
moment d’inattention fuit le maquis.
Que ne fut grande
la colère des justes qui décidèrent
de faire payer cet affront à l’homme
à la femme et à l’enfant mécréants.
Dans une descente
décidée par le tribunal du maquis,
ils rendirent visite à l’homme, à
la femme et à l’enfant.
L’homme et
la femme supplièrent les “justes”
de leur laisser la vie sauve et d’épargner
l’enfant, seulement leurs suppliques restèrent
sans écho du moment que le chef entendait
bien exécuter la sentence. Décapiter
les parents pour rendre licite le viol de leur
enfant, qui en application de la chariaa ne pouvait être pris comme butin de guerre en l’absence
de l’exécution de la sentence.
Avant l’exécution
de la sentence, 10 secondes ont suffi à
l’homme, à la femme et à l’enfant
pour voir les images de dix années défiler
dans leurs tête, dix ans à justifier
l’injustifiable.
Ce jour là
fort heureusement il n’y avait plus personne
parmi les neutres pour justifier la sentence divine
exécutée une fois de plus par les
justes.
Le lendemain, un
homme et une femme parmi tant d’autres ont
pris la décision de dénoncer le
crime des islamistes, et d’honorer la mémoire
des victimes, toute confession et conscience confondues.
Ce courage leur
a valu d’être condamnés à
leur tour, mais que fut féconde leur position
courageuse qui donna des idées aux habitants
de la ville du nord du pays ! D’autres
hommes et d’autres femmes ont pris leur
courage à deux mains et ont crié
haut et fort leur solidarité et leur soutien
aux condamnés. Ils ont demandé aux
autorités des armes pour honorer leur engagement,
et être fidèles au serment qu’ils
venaient de prononcer.
Le serment de vivre
dignes ou de mourir debout en défendant
tous ceux et toutes celles qui dorénavant
osaient dire qu’ils préfèrent
vivre d’abord le paradis de la vie avant
de vivre le paradis du ciel.
Le serment d’anéantir
le crime et d’éradiquer le mal qui
rongeait les citoyens de cette ville du nord du
pays.
Cette lutte s’est
poursuivie des années durant, il y eut
encore des assassinats, des enlèvements,
des décapitations, des massacres, des viols
et toutes sortes de crimes perpétrés
par les sanguinaires au nom de la religion. Mais
plus personne dans cette ville du nord du pays
n’avait refait l’erreur de justifier
les crimes, commis au nom de la foi de tout un
chacun.
Quand bien même,
et sous prétexte que le résultat
des urnes n’a pas été respecté,
l’Occident bien pensant, et le parti politique
démocratique laïque, poursuivaient
dans le déni du droit à la vie,
et soutenaient que l’islamisme est un passage
obligé pour la ville du nord du pays.
En effet, les enterrements
de victimes drainaient une foule nombreuse, de
toutes catégories de la population. Enfin
les familles enterraient les proches dans la fierté
d’être parents de victimes du terrorisme,
non des proches de sanguinaires islamistes.
Comme à
chaque enterrement la foule était de plus
en plus nombreuse dans les cimetières,
le nombre de victimes commença à
baisser, et les actes perpétrés
par les islamistes, à reculer, et la terreur
a été vaincue.
C’est alors
que l’on vit arriver des êtres tombés
de nulle part afin de mettre tout en œuvre
pour que les victimes qui avaient souffert, soient
les égaux de leurs bourreaux devant la
loi.
Dans la capitale
comme dans la ville du nord du pays, toute plaque
commémorative fut enlevée ou cassée,
et ces êtres mirent en place la politique
de l’oubli et de l’impunité.
L’impunité accordée à
des terroristes notoires, et la condamnation à
la prison ferme des victimes qui osent par un
écrit ou autre expression, cultiver la
mémoire et revendiquer la vérité
et la justice.
Au moment où
grâce à la lutte de tant de femmes
et d’hommes restés debout, le terrorisme
avait été vaincu et l’islamisme
n’avait plus droit de cité dans la
ville du nord du pays, ces êtres venus du
néant, profitant d’une période
d’aisance financière se sont appropriés
le bénéfice de la lutte des femmes
et des hommes qui avaient cru et s’étaient
battus pour des idées de tolérance
et de modernité. Ces spoliateurs ont instauré
une islamisation d’État qui a réduit
les revendications de la société,
à savoir l’émergence d’un
état de droit, aux signes ostentatoires
de la piété et la religiosité.
Pendant ce temps
de récupération des luttes pour
une citoyenneté effective, et d’instauration
d’un discours réconciliateur, trompeur
et hypocrite qui a ébranlé la conscience
et la mémoire collective, d’autres
femmes, et d’autres hommes de la ville du
nord du pays se faisaient assassiner dans le silence
et l’anonymat, crimes dissimulés
par la concorde civile et la réconciliation
nationale.
Cherifa Kheddar
Présidente
de l’association Djazairouna
Sœur
de deux victimes du terrorisme islamiste
Leila
Kheddar et Mohamed Redha
Partenaire
de l’Alliance Internationale Contre le
Terrorisme
ø