© Micheline Weinstein
Suite Journal ininterrompu
par intermittence 2021
Extension des post-it en vrac
Ich will
Zeugnis ablegen bis zum letzten
[Je veux témoigner
jusqu’au dernier jour]
Victor
Klemperer • Journal 1933-1947
31 mai - 02 juin 2021
Les mythes sont des satisfactions
symboliques dans lesquelles le regret de l’inceste s’épanche, ils ne constituent
pas la commémoration d’un événement • Freud
La
mythologie est un dictionnaire d’hiéroglyphes vivants • Baudelaire
ø
Gérard
Haddad
Ingénieur
agronome, médecin psychiatre, psychanalyste français, essayiste
Le
dimanche 30 mai 2021, Marc-Alain Ouaknin, lors de son émission régulière sur
France Culture, Talmudiques, recevait
Gérard Haddad, auteur de :
À l’origine de la violence
D’Œdipe à Caïn, une erreur de
Freud ?
paru en janvier 2021.
Sur
Internet, sa présentation par certains libraires est la suivante :
Et si Freud s’était trompé ? En faisant du meurtre du Père,
dans son essai Totem et tabou, l’acte fondateur des civilisations, n’est-il pas
passé à côté d’un fait majeur ? Pour Gérard Haddad, qui développe ici les
intuitions de ses recherches précédentes, c’est bien la haine fratricide, le
“complexe de Caïn” qui explique l’origine de la violence, plutôt que le seul
complexe d’Œdipe. Frappé par la dimension fraternelle présente chez les auteurs
des actes terroristes et les conflits entre les trois religions monothéistes,
Gérard Haddad invite à replonger aux sources des mythes et des grands récits
bibliques pour mieux questionner en profondeur la pensée psychanalytique. Avec
au passage cette interpellation vigoureuse lancée à nos sociétés : ne
sont-elles pas malades aujourd’hui d’avoir tant mis en avant le thème de la
mort du Père néfaste pour l’éducation et la transmission d’un esprit de
fraternité ?
Et celle de l’éditeur, Salvator :
Du trouble dans la fraternité
Après chaque explosion de violence terroriste, des voix s’élèvent : le
remède à la barbarie se trouverait dans le sentiment fraternel qui doit unir
tous les hommes. Mais la fraternité est-elle vraiment la solution ? Travaillé
par cette question brûlante, Gérard Haddad s’est replongé dans les textes
fondateurs, bibliques et littéraires. Il y a vu l’évidence : bien plus que le
complexe d’Œdipe, c’est le complexe de Caïn, cette rivalité fraternelle à l’origine
des plus grandes tragédies, qui mène le monde. Poursuivant la réflexion entamée
avec Dans la main droite de Dieu, Le Complexe de Caïn permet de mieux
comprendre le phénomène à l’œuvre dans la barbarie contemporaine.
Extrait de la présentation écrite sur le site
de France Culture :
Ces dernières lignes du
livre de Freud intitulé Malaise dans la civilisation ont gardé toute leur
actualité. Le combat entre éros et thanatos, entre l’« amour »
et la « mort », entre la « pulsion de vie » et la
« pulsion de destruction », est chaque jour renouvelé, ainsi que la
question des sources de la violence et des chemins qui permettraient de l’endiguer,
voire de la surmonter.
Mais
pour cela il faut faire le bon diagnostic [sic !].
Sur
cette question de la violence, et de ce qui est à la base de toute société,
Freud avait proposé en son temps quelques hypothèses fortes qui sont devenues
le socle de sa pensée et ont fondé la théorie et la pratique psychanalytique
pour lui-même et les générations de psychanalystes qui le suivirent. Mais
ces hypothèses sont-elles encore valides théoriquement et efficientes dans la
pratique ? La question mérite d’être posée ! Et dans tous les cas, on peut
se demander, si, aujourd’hui il n’y aurait pas une place pour de nouvelles
hypothèses ?
Dans son
argumentation, Gérard Haddad cite ses références : Adler, Jung, Le Président Wilson de Bullitt, dont la
plupart des psychanalystes savent que seule la préface de cet ouvrage au style phraséologique
poussif, authentifiée par Anna Freud et Max Schur, est de Freud*.
Voici ce
que j’ai écrit après audition à une collègue de renom, lue et écoutée de par le
monde :
« Bonjour ⌘⌘⌘
À part ce qu’avec
indulgence vous désignez par “conneries” - je n’ai à coup sûr pas manqué d’en émettre aussi dans ma
vie -, au su de l’audience que connaît l’émission Talmudiques», j’aurais souhaité qu’une personnalité influente dans le
milieu analytique se charge d’enduire d’un baume la mégalomanie de Gérard
Haddad.
En ouverture de sa prestation, Gérard Haddad exalte ses dix ans d’analyse
personnelle chez Lacan. Il est permis de se demander ce que Lacan aurait pensé
de l’utilisation de son nom, quel eut été son accueil devant, semblerait-il, ce
qu’au résultat il n’a pas vu venir.
Invité par Marc-Alain Ouaknin ce matin, ce ne sont pas nos modiques
“conneries” humaines qu’il nous a servi = réfutant publiquement dans son
nouveau livre la théorie du meurtre du père par Freud, sa fatuité délirante
est, comment cela pourrait-il en être autrement, inepte à réaliser qu’il vient
pour son propre compte, de tuer Freud, père de la psychanalyse.
Du coup, tacite, Haddad démolit le remarquable travail de fond (+
traduction) de Michel Fagard et Thomas Gindele, L’Homme Moïse un roman historique, que je vous avais signalé,
indépendamment des critiques que nous pourrions objecter**.
⌘⌘⌘, vous-même déplorez le soutien qu’apportent
certains psychanalystes aux thèses d’Haddad.
De mon côté, pour ce monde-là, je n’existe pas - Untel [bien qu’empruntant
à mon tronc quand ça lui sied] n’a pas hésité à me le dire ouvertement -, toute
intercession de ma part serait vaine***. »
Micheline W.
ø
Notes
* Pour un approfondissement
de l’analyse par Freud de la psyché de Wilson, se reporter à la présentation par
Élisabeth Roudinesco de la traduction du livre de Jean-Pierre Levebvre, Sigmund Freud. Un chapitre inédit, Portrait
psychologique du Président T. W. Wilson [cf. image en fin de texte].
Pour ma part, j’avais
présenté mes Travaux d’école deux
communications successives aux Journées organisées par Liliane Fainsilberg à Mantes-la-Jolie :
• l’une en juin 1985, à la « Journée
du Boulimos », Philon Juif, auteur
très éloquent et philosophe très grave, ou Des Thérapeutes et de la voie mystique ;
• la seconde en juin
1986, à la « Journée du fil de l’eau », William Bullitt, Le Président Wilson, selon la théorie des « Mathèmes » de Lacan, sous le contrôle
critique de François Le Lionnais.
En
1997, dans mon Petit glossaire des
concepts freudiens appliqués à la clinique selon François Perrier, au
signifiant Psychotique, j’avais
ajouté la note suivante : « Notons
que le Journal de l’Homme aux loups est une intéressante illustration de
cette remarque de F. P., de même que le style de Bullitt, dans Le Président
Wilson. » [Réédition amendée en 2020].
** Je m’y exerce par ailleurs.
Un seul exemple = dans Das Unheimlich », « L’inquiétant
familier », Freud précise que le “Un-” pour la
psychanalyse est la marque du refoulé, tel le Unbewusst, l’inconscient, le savoir embusqué à l’insu du locuteur. Dans Der Witz und seine Beziehung zum
Unbewussten, Freud relate une blague scatologique, qui à mon goût n’est pas
un mot d’esprit, mais une sorte de calembour que de préférence les hommes se
racontent entre copains lors d’un repas arrosé.
Beurk ! La
scatologie me flanque la nausée.
Par contre, dans ce
même ouvrage, l’authentique mot d’esprit à mon sens s’apparente à l’humour,
dont Freud écrit :
Et Perrier d’ajouter :
Humour • Rien
de plus désintéressé. Ne va pas sans une critique libre de soi-même. L’humour
est aussi un dévoilement de l’objet sous un autre jour, mais dans une pudeur,
une réserve, une contention qui n’est pas celle du comique avec ses effets de
cirque, ses chutes répétées. L’éthique de l’analyste est de ce côté-là.
***4e de Couv. de « L’Homme Moïse un roman historique »
de Michel Fagard et Thomas Gindele
En septembre 1934, Freud achève un ouvrage qu’il intitule L’Homme
Moïse, un roman historique, mais il ne le publie pas. Un mois plus tard, il
écrit à Max Eitingon : « Une partie du texte inflige de graves offenses au
sentiment juif, une autre au sentiment chrétien, deux choses qu’il vaut mieux
éviter à notre époque. » Puis en 1935, il confie à Lou Andreas-Salomé à propos
de la figure de Moïse : « Ce problème m’a poursuivi toute ma vie. » C’est dire
l’importance de cette réflexion sur la Bible, le judaïsme, et le christianisme
pour le père de la psychanalyse. En conservant — contrairement à son habitude — ce manuscrit
autographe, Freud a probablement souhaité laisser des traces sur l’élaboration
complexe de son travail sur le monothéisme. Cette version initiale, transcrite
ici pour la première fois, nous permet de comprendre pourquoi et comment, alors
que le nazisme se répand partout en Europe, Freud a infléchi, voire crypté, sa
pensée au fil des années, jusqu’à la publication de son livre testamentaire sur
Moïse, paru en 1939.
[Tania Bloom est un pseudo]