ψ =
psi grec, résumé
de Ps ychanalyse
et i déologie.
Le NON
de ψ
[Psi]
LE TEMPS DU NON
s'adresse à l'idéologie
qui, quand elle prend sa source dans l'ignorance
délibérée,
est l'antonyme de la réflexion, de la raison,
de l'intelligence.
© M. W. / 02 juin 2013
Daniel Cordier
Suite, par JForum, à l'entretien entre Patrick Cohen et Daniel Cordier sur France Inter
Nous reproduisons ci-dessous les commentaires
parus dans JForum, à la suite de l’entretien sur
France Inter entre Patrick Cohen et Daniel Cordier. Hélas pour l’information
des auditeurs, juste avant la clôture de l’émission, un célèbre journaliste que
j’ai connu tout petit, a cru pertinent de manifester sa présence, dénombrant
les glorieux chiffres de Juifs en France non déportés, témoignant ainsi, une
fois encore, de son ignorance incongrue. Daniel Cordier eut juste le temps de
conclure, paisible : “C’est ce que j’ai vu”. Ajoutons : “entendu et
recueilli dans les archives”, autrement dit : “je sais de quoi je parle, j’y
étais”.
Par ailleurs, sur le même sujet, parution d’un
petit livre,
Nelcya Delanoë
D’une petite rafle provençale
Préface de
Laurent Joly
Le Seuil, Paris, mai 2013
dans lequel nous retrouvons le poète
Aragon, écrivains, éditeurs ...
... ... ... ... ... ... ....
Exergue de ce petit livre,
« Il
souffle un vent de toute beauté sur l’Enfer »
En 1942, le long poème d’Aragon (pp. 27-29 de
la « petite
rafle... ») fut interdit de
publication par Pétain et édité en Suisse dans la Revue « En
Français dans le texte ».
m. w.
ø
http://www.jforum.fr/forum/france/article/la-denonciation-des-juifs-une
Antisémitisme, ce que la
France veut absolument cacher
http://www.jforum.fr/
31
mai 2013
Mais si, les lettres de dénonciation des
juifs sont accessibles.
Mercredi 20 mai 2013, dans la matinale de
France Inter, Patrick Cohen a reçu Daniel Cordier, historien, résistant et
secrétaire particulier de Jean Moulin.
L’interview porte sur son
livre, « Alias Caracalla »,
son adaptation télévisée et la documentation disponible sur la Seconde Guerre
mondiale, dans laquelle Daniel Cordier s’est plongé.
Soudain, l’historien énonce
un fait surprenant sur l’Occupation :
« Daniel Cordier :
– Actuellement, vous n’avez qu’une partie des archives qui sont ouvertes.
Et l’ensemble des archives de la guerre sera ouvert après la mort de ma
génération.
Patrick Cohen : – C’est-à-dire qu’il y a des choses que les
historiens des années 2040 et 2050 vont découvrir sur la Résistance et sur
l’histoire de la France libre ?
– On va découvrir,
hélas la situation de la France. Parce que l’ensemble des Français est
antisémite. [...] J’ai eu de la chance, dans les trois mois que j’ai passés à
Chartres. Un jour, après un déjeuner, le directeur [des Archives, ndlr] m’a
dit : “Avant de vous mettre au travail je vais vous montrer quelque
chose.” Nous sommes descendus à la cave. J’ai vu par terre des paquets blancs,
empilés les uns sur les autres. Il dit : “Ça vous ne le verrez jamais,
parce que ce n’est pas pour votre génération. Ce sont les lettres de
dénonciation des juifs.”
– Pour protéger les
personnes et leur descendance, ces archives sont encore inaccessibles pour
quelques années ou quelques décennies.
– Ça sera difficile à
ouvrir, mais tout s’ouvrira. Dans les années 2040-2050, il y aura une nouvelle
génération d’historiens qui aura encore plus d’exigences que les historiens
d’aujourd’hui. Et là, je pense que ce sera une autre histoire de la Résistance
et qu’on s’approchera de la vérité. »
Des lettres de dénonciation
en ligne
Les lettres de dénonciation
des juifs pendant la Seconde Guerre mondiale seraient inaccessibles ? À Rue89, on s’est cassé la tête pour essayer de comprendre si
c’était une question de délai, de protection des héritiers ou de données
nominatives qui ne devraient pas être mises à la disposition du public.
Pourtant, avec une simple
recherche Google, on trouve très facilement des documents :
Õ ici, la lettre d’un dénommé Lozet, « garde assermenté » au cimetière du
Père-Lachaise, qui moucharde sur un de ses collègues. Dans une autre lettre,
écrite à Avignon, une mère de famille s’inquiète qu’un jeune homme juif
courtise sa fille. Elle demande au préfet de l’éloigner ;
Õ dans ce documentaire d’André Halimi,
diffusé en 1983, des lettres sont reproduites :
Õ un colloque sur « la
dénonciation en France pendant la Seconde Guerre mondiale », réunissant
une trentaine d’historiens, a même eu lieu en 2008 à Caen.
« Les gens ressortent
bouleversés »
En fait, Daniel Cordier a
tort et raison à la fois :
Õ raison, parce que la
plupart des documents sur la Seconde Guerre mondiale ne seront pleinement
accessibles au public qu’entre 2015 et 2020 ;
Õ tort, parce que ce délai n’empêche pas leur consultation
par des historiens, professionnels ou amateurs, des journalistes, des écrivains
ou même des particuliers qui font des recherches. Ils peuvent demander (et
obtiennent le plus souvent) des dérogations pour travailler sur les archives
avant expiration du délai.
Pour comprendre, il faut se
plonger dans le maquis réglementaire. Les « délais de sérénité »,
au-delà desquels les archives de l’administration sont rendues publiques, se
sont raccourcis. D’abord encadrés par une loi de 1979, ils ont été réduits par
la loi de 2008, comme le montre ce tableau.
Un dossier judiciaire, par
exemple, peut aujourd’hui être consulté au bout de 75 ans. S’il date de 1940,
il ne devrait donc être disponible qu’en 2015. Cependant, les historiens
bénéficient de nombreuses exceptions. Et ces dernières années, l’accès à tous
ces documents s’est largement démocratisé.
Jean-Marc Berlière,
professeur d’histoire contemporaine, passe beaucoup de temps aux archives de la
préfecture de police de Paris. Il a vu le public s’accroître.
« Dans les années 1980,
c’était fermé de chez fermé, j’étais tout seul. Maintenant, c’est plein tout le
temps. Les lois et surtout les circulaires sont allées dans un sens extrêmement
libéral.
Les gens ressortent
bouleversés par ce qu’ils ont trouvé, émus et surpris que les archivistes les
accueillent à bras ouverts. »
Gilles Morin, professeur
d’histoire aussi, confirme que les affirmations de Daniel Cordier relèvent
d’une conception un peu datée des archives.
« Une grande partie des
dossiers qu’on ne pouvait pas voir il y a dix ans, quinze ans, sont visibles
maintenant. »
Les dérogations sont très
souvent accordées. Et comme le rappelle Antoine Prost, historien qui siège à la
Commission d’accès aux documents administratifs (Cada) :
« Le refus de dérogation
peut être soumis à la Cada, qui se montre
généralement ouverte s’il s’agit de recherches, et non de règlements de comptes
anciens. »
Quelques difficultés
pratiques
Cet accès aux archives de la
Seconde Guerre mondiale a permis par exemple à l’historien Laurent Joly de
publier des travaux sur la dénonciation des juifs sous l’Occupation. S’il
estime, dans Libération, que « l’historiographie a du retard », ce
n’est pas parce que les archives sont fermées mais plutôt
sous-exploitées :
« Nombre de fonds
d’archives restent à analyser, celles de l’administration, celles des polices
parallèles de Vichy, les mains courantes des commissariats de quartier. »
Les difficultés rencontrées
par les chercheurs sont davantage pratiques que juridiques :
Savoir où chercher
Pour savoir à qui demander la
consultation d’un dossier, « il faut connaître l’organigramme
administratif de l’époque », explique Jean-Marc Berlière.
« Tout le monde ne sait
pas que certaines archives de la police nationale se trouvent aux Archives
départementales, que tel service de police disparu s’occupait de la répression
des juifs, que pour trouver des documents sur les meurtres miliciens dans le
Gard, il faut aller à Marseille, que certains dossiers judiciaires de
l’épuration ont été dépaysés, etc. »
« Certains fonds restent
méconnus parce que personne n’en connaît l’existence », complète Gilles
Morin. D’autres sont mal inventoriés, au point que les archivistes eux-mêmes ne
savent pas forcément ce qu’ils contiennent. Ils disposent d’un grand nombre de
documents non classés, et ne peuvent accéder qu’à des demandes très précises.
Protéger les données
personnelles des tiers
Gilles Morin poursuit en
citant un autre écueil fréquent :
« Si je cherche le
dossier concernant une affaire judiciaire, à partir d’un nom dont je dispose, je
dois prouver que la personne est morte depuis plus de 25 ans.
Mais en consultant son
dossier, je risque de tomber sur le nom de tiers évoqués dans la procédure,
auquel cas certains services d’archives préfèrent refuser l’accès. »
Des documents manquants
Même si le versement des
dossiers aux archives est obligatoire passé un certain délai, certains services
administratifs gardent la main sur leurs documents. Volontairement – pour
les services secrets notamment, qui tardent à rendre leur butin public –,
mais parfois simplement par négligence ou méconnaissance des règles en vigueur.
Parfois aussi, l’état de
certains documents, imprimés sur du papier de très mauvaise qualité pendant la
Seconde Guerre mondiale, rend leur consultation risquée : des frottements
trop répétés pourraient les faire tomber en lambeaux.
Les archives de la préfecture
de police de Paris sur l’Occupation sont ainsi en cours de numérisation, pour
être mises en ligne et accessibles à tous en 2015. Mais dans l’intervalle,
elles sont gelées : les chercheurs ne peuvent pas les voir.
Finalement, avance Jean-Marc Berlière :
« Il n’y a pas
d’archives cachées, il n’y a que des archives égarées, non inventoriées, volées
(notamment par les FTP et le PCF à la Libération), détruites. »
Mais selon lui, si les
archives de la Seconde Guerre mondiale recèlent encore des secrets, c’est moins
en raison des difficultés d’accès que du fait des historiens eux-mêmes, qui
selon lui passent de moins en moins de temps à travailler sur ces sources brutes.
DE 150 000 À 500 000 LETTRES
Selon Antoine Prost,
« les chercheurs qui ont travaillé sur ces paquets de lettres,
effectivement très nombreuses [entre 150 000 et 500 000 dans toute la France,
ndlr], ont trouvé une minorité de dénonciation de juifs : on dénonce les
trafiquants du marché noir, des voisins qu’on n’aime pas et qui écoutent la
radio de Londres, des femmes de prisonniers qui trompent leur mari, etc... Et bien sûr des juifs. »
Camille Polloni - Rue 89