© Micheline
Weinstein
7_Suite Journal 1967-2020 ininterrompu
par intermittence
Extension des post-it en vrac
Ich will
Zeugnis ablegen bis zum letzten
[Je veux témoigner
jusqu’au dernier jour]
Victor
Klemperer • Journal 1933-1947
8-19 juillet 2020
Jean-Pierre
Faye
[Membre d’honneur de notre association-site]
Il ne faut
pas avoir peur du bonheur. C’est seulement un bon moment à passer • Romain Gary
Bon anniversaire, Jean-Pierre !
Le corps miroir
Jean-Pierre Faye
Préface de Michèle Cohen-Halimi
Le corps miroir, premier livre de Jean-Pierre Faye aux éditions Nous et annoncé par l’auteur comme son
dernier livre, révèle la puissance de pensée de cette figure majeure de la
philosophie contemporaine. C’est un livre fascinant, composé d’une chaîne de
récits et de réflexions sur le temps, sur les langues, sur l’homme - mais aussi
sur le corps, sur le visage en tant que reflets du monde. Le volume s’ouvre par
une préface de Michèle Cohen-Halimi, qui retrace le parcours de l’auteur et
interprète la place de ce livre en son sein.
Ce dernier livre de Jean-Pierre Faye porte à son comble
certaines des questions soulevées ailleurs dans son œuvre : celle du montage des
récits, celle de l’écoute ou de la lecture de ce montage et, plus radicalement
que jamais, celle du statut du sujet narrateur. Dans cette méditation, il s’agit
également de repérer les surgissements de certains vocables, de certaines
expressions dans l’histoire, leurs bougés, leur impact, leur “frappe”, de les
déchiffrer et d’en analyser les transformations.
Tous les vocables repérés et poursuivis par Jean-Pierre Faye
dans ce livre composent le grand récit de la déraison narrative de l’histoire
du XXe siècle : la disqualification de la “métaphysique”, sa mise en
équivalence par Heidegger avec le “nihilisme”, la genèse du totalitarisme nazi
à partir de la circulation du syntagme “Stato totalitario” prononcé par Mussolini,
l’invention du “logocentrisme” par Ludwig Klages.
Enfin, magistralement, le premier surgissement dans la langue d’Homère
du mot qui, à partir de l’idée de la confluence des fleuves, va dessiner les
premiers contours de la “conscience ”.
https://www.decitre.fr/livres/le-corps-miroir-9782370840806.html
Le Corps Miroir, selon la décision de
Jean-Pierre Faye, est son œuvre ultime. Son fils, Emmanuel Faye, remarquable
philosophe-historien de la philosophie, en ces temps où elle est aplatie jusqu’à
être réduite à des verbiages médiatiques, assure un courageux relais.
Un seul
exemple d’ignorance délibérée véhiculée
par iceux verbiages de la part du trust lacanien = s’étant épargné la lecture
de Freud, les intitulés psychanalystes et y afférents assimilent sans état d’âme pulsion de mort et vœu de meurtre.
• Pulsion de mort - Inhérente chez chaque être humain en sa qualité d’individu singulier, elle désigne la poussée
qui l’incitera sa vie durant à retrouver ce que Freud nommait son état
originaire anorganique. Ainsi, elle agit
sur le principe de plaisir, autrement
dit sur le désir inconscient d’en faire le moins possible pour durer le plus
longtemps, de se contenter de la satisfaction immédiate d’un plaisir dans le
présent, quelle qu’en soit la nature.
La pulsion de mort n'a pas de mémoire.
• Vœu de meutre ou d’assassinat - Issu de la conjoncture œdipienne, donc infantile, il s’adresse à l’autre en tant que métaphore d’une
jalousie irrépressible animée du désir tout aussi inconscient de tuer qui gêne
(à l’origine, le père, la mère, les frères et sœurs, l’entourage, puis tout
être vivant).
Ce sont deux instances
à explorer lors d’une psychanalyse individuelle dans la perspective de les
maîtriser si l’on aspire à une vie intérieure autant que sociale plus
harmonieuse.
Le passage à l’acte
criminel relevant, en tout cas dans un premier temps, de la criminologie.
Revenons à
Jean-Pierre Faye, dont les lectrices et lecteurs intéressés trouveront en pièce
jointe le recensement non exhaustif des contributions que nous avons eu le
privilège de publier, alors en éditions-papier, dont certaines sont reproduites
sur notre site et inventoriées par les moteurs de recherche.
En 1967, j’avais
répondu dans un écrit (cf. in mes Travaux 1967-1997) à la Proposition d’octobre… pour la fondation
de son École de Lacan par une étude du langage dont j’avais l’impression d’une
proximité entre le sien et celui et d’Heidegger. Voici un extrait de la pensée
de Heidegger, datée de 1949, soit 5
ans après la fin de la 2e G. M., laquelle m’avait consternée, dont j’espérais
qu’elle allait éveiller l’attention des collègues psychanalystes :
[…] Alors, quelle était l’appréciation de Heidegger sur la
psychanalyse ? En portait-il seulement une ? En effet. Dans son “Introduction” de
1949 à « Qu’est-ce que la Métaphysique ? », dédiée à Hans Carossa pour son
70e anniversaire, dédicace omise dans la traduction française car
Carossa présida une fois la Chambre Internationale des Écrivains, créée et contrôlée
par Goebbels, voici ce qu’on peut lire, in “Questions I” :
S’il en était ainsi de l’Oubli de l’Être, ne serait-ce pas une
raison suffisante pour qu’une Pensée qui pense l’Être soit prise d’Effroi, car
rien d’autre ne lui est possible que soutenir dans l’Angoisse ce Destin de l’Être
afin de porter d’abord la Pensée en présence de l’Oubli de l’Être ? Mais une
Pensée en serait-elle capable tant l’Angoisse ainsi destinée n’est pour elle qu’un
État d’Âme pénible ? Qu’à donc à faire le Destin Ontologique de cette Angoisse
avec la Psychologie et la Psychanalyse ?
Et dans la langue, à l’intention des germanistes, qui sauront y
mettre le son :
Wäre wenn es mit der Seinsvergessenheit so stünde, nicht
Veranlassung genug, dass ein Denken, das an das Sein denkt, in den Schrecken
gerät, demgemäss, es nichts anderes vermag, als dieses Geschick des Seins in
der Angst aus zuhalten, um erst das Denken an die Seins vergessen heit zum
Austrag zubringen ? Ob jedoch ein Denken dies vermöchte, solange ihm die so
zugeschickte Angst nur eine gedrückte Stimmung wäre ? Was hat das Seins
geschick dieser Angst mit Psychologie und Psychoanalyse zu tun ?
Ce galimatias, selon Jankelevitch, du bas
latin ballimathia “chanson obscène”, entortillé sur lui-même,
évoque de façon aiguë le mince écart dont parle Freud entre le discours
philosophique et le discours du délirant, avec son risque de bascule...
Freud, en son temps, se méfiait de “l’obscure philosophie
hégelienne.” […]
En
53 ans, j’eus beau, inlassable, la répéter auprès des collègues, en privé et en
public, par écrit et à l’oral, cette étude n’a intéressé personne.
C’est
ainsi qu’en 1972 j’ai acquis Langages
totalitaires de Jean-Pierre Faye, devenu mon livre de chevet, rejoint en
1995 par Ich will Zeugnis ablegen bis zum letzten de Victor Klemperer, dans lequel Freud et son œuvre n’échappent
pas à la chasse aux Juifs.
C’est ainsi que j’ai
rencontré Jean-Pierre Faye qui en 1991, lors d’un colloque de psychanalystes
lacaniens, a lu cette introduction de Heidegger.
Elle n’a intéressé
personne.
Aussi, Jean-Pierre,
Emmanuel, demeurons d’authentiques philosophes, remettons-nous-en à Pierre Dac,
Il
faut une infinie patience pour attendre toujours ce qui n'arrive jamais.
Bon anniversaire,
Jean-Pierre !
Micheline W.