© Guy Konopnicki / Janvier 2010
L’identité, une affaire de papiers
par
Guy Konopnicki
Avec l’autorisation de l’auteur
1e publication in l’hebdomadaire « Marianne », semaine du 16 au
22 janvier 2010
Site quotidien Marianne2
Sur le plateau
d’Yves Calvi, François Hollande et Jean-François
Copé se sont engagés à se
pencher sur les tracasseries réservées
aux citoyens français dont les parents
eurent le tort de naître à l’étranger.
Pour obtenir ou juste renouveler une carte d’identité,
un passeport, on nous somme d’apporter les preuves
de notre nationalité, de fournir des actes
et des certificats conservés, en principe,
dans l’obscurité d’une tour de Nantes.
Ayant évoqué ici même, en
août 2009, la situation ubuesque d’une fonctionnaire
de l’Éducation nationale, née à
Metz de deux parents français, les miens,
j’ai reçu, depuis, plus d’une centaine
de lettres, de courriers électroniques
et d’appels téléphoniques. Comme
j’avais évoqué le nom d’Ubu, prenant
soin de me référer à un auteur
français, Alfred Jarry, plutôt qu’à
un Praguois de langue allemande, Kafka, j’ai quelque
peu froissé le sous-préfet concerné
par le dossier évoqué. En fait,
Jarry et Kafka n’avaient rien vu. Les courriers
reçus ici, les témoignages récemment
publiés par Libération
et Le Monde
décrivent une variété infinie
de situations absurdes. On se croit français,
et devant le guichet d’une mairie ou d’une sous-préfecture,
on se retrouve apatride.
La consonance du nom suffit
parfois à éveiller la suspicion
Ainsi, une femme
fraîchement divorcée, née
dans le département du Pas-de-Calais, entendait
reprendre son nom de jeune fille. Elle disposait
d’une carte d’identité et d’un passeport,
ce qui laissait supposer que l’administration
avait déjà vérifié
sa nationalité. Mais son nom de jeune fille
commence par un W et comporte un K et même
un Z. Ces lettres figurent dans l’alphabet utilisé
pour écrire la langue française.
W, comme Wallon, député, auteur
de l’amendement fondateur de la IIIe
République en 1875. K, comme Kléber,
général français assassiné
au Caire et comme kilo, mesure de poids et de
distance, en vigueur depuis l’adoption par la
France du système décimal et du
système métrique, Z, comme le Zouave
du pont de l’Alma et comme Zazie, héroïne
d’un roman de Queneau. Seulement, le grand-père
de Mme WKZ était un mineur polonais. Il
n’avait pas volé sa nationalité
française : engagé en 1939 dans
la Légion étrangère, il a
participé à l’épopée
de la France combattante, de Bir Hakeim au Danube.
Il n’a obtenu sa naturalisation qu’en 1949 ! Sa
petite-fille, pour obtenir une carte d’identité,
doit prouver qu’elle n’était pas française
par mariage, comme si le divorce était
sanctionné par la déchéance
de nationalité. Et elle doit, comme moi-même,
présenter un certificat de naturalisation
remontant à trois générations.
Le piquant de l’affaire, c’est que cette dame
WKZ passe le plus clair de son temps à
contrôler des papiers d’identité.
Elle est officier de la police nationale. Pour
accéder à cette fonction, il faut
être de nationalité française.
Mais la carte de flic n’est pas une preuve de
nationalité.
Ce n’est rien encore
Un homme répondant
à un nom français des plus courants,
sans W et sans K, se retrouve suspect de n’être
pas français. Il a eu le tort de naître
à Baden (Allemagne) d’un père officier
français et d’une mère native d’Indochine.
Il est né à l’étranger !
Non content d’’être militaire de carrière,
stationné en Allemagne, son Tourangeau
de père a épousé une Vietnamienne.
Un père qui se mettait quotidiennement
au garde-à-vous devant le général
Massu ne vous dispense pas de répondre
de votre mère d’outre-Mer ! Des fois que
des étrangers tenteraient de se faire passer
pour français ! Et je ne suis pas certain
d’avoir exposé ici les témoignages
les plus extravagants. On pourra parler de l’identité
nationale quand on ne suspectera plus les citoyens
nés hors de France ou issus de parents
nés à l’étranger.
ø
©
Micheline Weinstein /
Janvier 2010
Journal de bord, fin
janvier 2010
Monsieur a son avenir devant
lui et, chaque fois qu’il se retournera, il l’aura
dans le dos.
Pierre Dac
Cité
par Martine Chosson in
« Parlez-vous la langue de bois ? Petit
traité de manipulation à l’usage
des innocents », Éd. Points, Collection Le goût des mots, Paris, 2007.
À propos
de l’ouverture des droits sur l’œuvre de
Freud - qui, selon Jean Laplanche, si vous
additionnez tous les éditeurs, [il] était
déjà dans le domaine public
- F. RI, dans Libération
du 5 janvier 2010, cite ainsi un extrait du livre
de Alain de Mijolla,
“Les
Français ont toujours été
hostiles à Freud à cause de Pierre
Janet et des théories qui existaient en
France avant lui. La psychanalyse a eu du mal
à rentrer et a été éreintée.”
Je ne suis pas
très sûre que l’hostilité
de la France envers Freud et à son œuvre
relève seulement de la prépondérance
des travaux et théories de Pierre Janet.
Quoiqu’il en soit, la France, Freud le notait
dans son histoire du mouvement analytique*,
fut, le dernier pays au monde à se résoudre
à accepter la psychanalyse et ce, 30 ans
après qu’eût été forgé,
par son auteur, le nom de Psychoanalyse, grâce à l’influence et à la fortune
de Marie Bonaparte, fondatrice en 1926, à
titre privé, de l’Institut de Psychanalyse,
ouvert au public, lequel assura dès lors
officiellement la formation des psychanalystes.
C’était
bien après la guerre de 14-18 entre l’Allemagne
et la France, quand Freud était identifié,
de par la langue dans laquelle il pensait, parlait
et écrivait, comme Allemand et comme Juif,
bref étranger où qu’il se trouve. Voici ce qu’il en dit lui-même
en 1924 dans « Résistances à
la psychanalyse »,
Pour
terminer, la question peut, sous toutes réserves,
être évoquée, de savoir si
la personnalité de l’auteur en tant que
Juif, qui n’a jamais cherché à dissimuler
sa Judéité, n’a pas contribué,
de la part du milieu ambiant, à son antipathie
pour la psychanalyse. Mais il est rare qu’un tel
argument soit publiquement formulé. Nous
sommes hélas devenus si défiants
que nous ne pouvons nous empêcher de penser
à ce fait comme étant demeuré
sans aucune influence. De plus, ce n’est peut-être
pas simplement un hasard si celui qui, le premier,
prit fait et cause pour la psychanalyse, soit
un Juif. Avoir foi en cette nouvelle théorie
exigeait, dans une large mesure, d’être
disposé à accepter la condition
d’isolé dans l’opposition - destinée
qui, plus qu’à tout autre, est familière
à un Juif.
Par chance, récemment,
nous avons échappé à l’expression
“Identité Nationale Positive”
!
Et par hasard personnel,
à la différence des fonctionnaires
de l’Éducation nationale et de police,
évoqués par Guy Konopnicki, écrivain,
à la différence d’Anne Sinclair
semblerait-il aussi, étant Pupille de la
Nation, je n’ai pas à subir la contrainte
de prouver ma nationalité française
sur 3 générations quand j’ai à
faire établir ma carte d’identité.
3 générations ! Aux Juifs, cela
rappelle des choses... qui font que la dédicace
de l’ensemble de mon travail s’adresse aux bébés
juifs, emportés avec leurs mères
à Birkenau, assassinés sans État-Civil, puisque nous débattons de l’“Identité
Nationale”.
* Les références
exactes aux écrits de Freud, autres auteurs,
autres documents, figurent dans mes textes, plus
ou moins anciens, sur notre site, je n’ai pas
encore eu le temps de les regrouper pour les inventorier.
De telle sorte
qu’aujourd’hui, en 2010 où persiste, sinon
l’hostilité, du moins l’indifférence
à l’étude approfondie de l’œuvre
de Freud, soit au respect pour son auteur, il
est permis de s’interroger sur ce que l’on entend
en France par la désignation, le sens,
de l’intitulé de la discipline «
Psychanalyse ». Quant à ses applications
pour une pratique analytique freudienne, sur quelles
bases, sur quels principes, sont-elles alors établies
?
Les matraquages
éditoriaux fructueux ne changeront rien
à cette énigme. Pas plus que l’apport
de mots nouveaux en forme de concepts, dont on
a l’impression qu’ils apparaissent - et pour certains,
disparaissent - tels des accès de mode
médiatique à l’avantage de leurs
auteurs, non pour maintenir vivace la psychanalyse
et le nom de Freud autrement que comme une effigie,
un totem, mais, comme au Moyen-Âge lors
de la « Fête des Fous »,
pour les contrer, les brûler à répétition.
Pourtant la psychanalyse
n’est pas un dogme. La maintenir vivace implique
d’en travailler sans cesse les hypothèses,
les principes, de les mettre à l’épreuve,
comme le fit, pour ne citer qu’un exemple, Anna
Freud, au sujet de la position de son père
- qui d’ailleurs reconnaissait modestement n’y
pas comprendre grand-chose - à l’égard
des femmes.
Est-ce de psychanalyse
que l’on s’occupe pour faire vendre des ouvrages déversant, après que chacun des
auteurs de ces publications eût regardé
son fantasme, comme le
font les enfants, par le trou de la serrure, des
ragots, voire des calomnies, écœurants
: Minna Freud, sœur de Martha, aurait été
la maîtresse de Freud, Anna Freud celle
de Dorothy Burlingham et réciproquement...
Est-ce cela la psychanalyse, confondre la théorie
de la sexualité avec une théorie
de la pornographie ?
Quant au morceau
d’analyse par Freud auprès de sa fille
Anna, j’en ai parlé ailleurs. Nous savons
maintenant, depuis plus d’un siècle, chaque
analyste par expérience, que les résistances,
l’hostilité, les transferts négatifs,
à la psychanalyse, nous obligent parfois
à ne pouvoir faire confiance, pour la transmission
de la théorie freudienne, qu’à un
analysant ou une analysante, psychanalystes confirmés,
sinon familiaux, du moins proches.
De mon côté
: on apostrophe - gentiment - quelquefois par
cette expression, “Comment va ton site Juif
?” Notre site n’est pas “un site juif”, nous parlons simplement
de ce que, par expérience, nous connaissons
le mieux, sans omettre, quand un texte est signé
de ma main, de préciser que la xénophobie
à l’encontre des Juifs est un condensé,
un florilège, exemplaires, sans égaux,
de toutes les formes existantes de xénophobie,
une vérité historique, c’est-à-dire,
selon Freud, une vérité vraie.
Et, une fois pour
toutes, si je trouve une croix gammée et
des inscriptions antisémites sur ma boîte
à lettres - cf. mon nom, les références
du site -, un grand “JUDEN” peint
sur le mur d’à côté, si j’entends
les injures à la personne les plus ignobles,
les menaces physiques en pleine rue - mes proches
non-Juifs également -, le tout accompagné
de vandalismes divers, histoire de me faire partir
- “on veut vous foutre dehors du quartier
!, braillent ouvertement les locataires avalisés par
le Cabinet gérant -, sans chercher aucunement
à m’adresser à l’une des multiples
institutions en place, c’est que, de tout temps,
la posture de victime ne me convient pas.
Je m’en remets
donc aux spécialistes professionnels, la
police, qui fait son boulot, et à la Loi,
ce qui par contre est très éprouvant
et hors de prix.
Pourquoi éprouvant
?
Dans Le Figaro du 21 janvier 2010, Maître Dupont-Moretti
donne son point de vue sur le projet de supprimer
le juge d’instruction, qui “n’est pas une
vache sacrée”, dont voici un extrait,
Le
virus fondamental est tapi dans les entrailles
de la machine judiciaire. Personne n’en parle
jamais, car le sujet est austère, technique,
tabou. Mais il y a quelque chose de cocasse à
opposer, dans le projet de réforme, le
juge du siège et le magistrat du parquet,
puisqu’ils sont cousins, jumeaux, voire siamois.
Ils sortent de la même école, font,
pour la plupart, carrière en passant du
siège au parquet, du parquet au siège.
Ils se tutoient, copinent, se marient. Le plus
inquiétant, c’est d’observer que la plupart
des magistrats qui ont goûté à
l’indépendance proclamée du siège
ne renâclent nullement quand il s’agit de
signer un bail pour le parquet « aux ordres
», pourvu que cela accélère
leur carrière.
Rayer
le magistrat instructeur ? D’accord. Mais aussi
- d’abord ? - le lien contre-nature qui unit insolemment,
en les parant de la même robe, le juge et
le procureur.
Ce ne sont pas
seulement les juges et les procureurs qui “sont
cousins, jumeaux, voire siamois. [Qui] sortent
de la même école [...] [Qui] se tutoient,
copinent, se marient... ”.
Nombre d’avocats agissent exactement de même,
ce qui, du reste, a donné lieu a des considérations
très négatives de particuliers,
notamment des personnalités dans les milieux
les mieux informés, qui refusent catégoriquement,
s’ils n’y sont pas contraints, d’avoir à
faire avec la corporation. Pour, le tout-venant,
vous vous adressez à un avocat, dans l’espoir
ingénu qu’il défendra vos intérêts,
moraux et matériels, vous lui apportez
un dossier bien classé, avec chemises et
sous-chemises titrées, dépôts
de plaintes, attestations des témoins,
papiers officiels... , et voilà qu’instantanément
on commence par détruire votre soigneux
assemblage en y flanquant la pagaïe, puis
on vous déclare qu’on est débordé
et qu’on n’a pas le temps de lire votre courrier
spécifique, comme si on vous consentait
une faveur en se chargeant de votre affaire. Bien
innocemment, je demande à “on”
pourquoi on l’a acceptée et pourquoi je
paye, ce qui indispose le Maître. Ensuite,
parce que vous ignoriez qu’un avocat de la défense
défend les accusés pénaux, sinon il s’intitule lui-même “conseil”,
“médiateur”, vous constatez
qu’il s’est mis d’accord avec la partie adverse,
j’ai fini par apprendre que c’est la coutume dans
la corporation.
Là-dessus
- sautons les années d’attente épuisantes
et de reports qui, si l’on est solide psychiquement,
n’altèrent pas les activités privées
et professionnelles, mais usent sérieusement
la santé physique, comme cela m’est déjà
arrivé ainsi qu’à nombre de contemporains,
vous vous retrouvez le bec dans l’eau, dehors
et sans le sou, quasiment en position d’accusé
pour avoir osé, de par la conjoncture,
n’étant pas propriétaire par exemple,
vous adresser au barreau.
De quelque côté
que l’on se tourne, l’horizon semble bien obturé.
Pupille de la Nation, j’ai fait une demande de
logement auprès de la Ville de Paris depuis
plus de 10 ans, histoire, non d’être privilégiée,
mais de pouvoir vivre, travailler et finir mes
jours en paix, libre d’une inquiétude taraudante,
puisque non propriétaire et sans patrimoine.
En vain, aucun succès.
De plus, le temps
passant, voici que l’on se heurte à la
discrimination, non seulement par genre, mais
par l’âge, je n’avais pas pensé à
ça, dès l’approche de la soixantaine,
l’attribution semble définitivement grillée.
ø
La question qui
se pose depuis l’avènement de la grande
vitesse dans le temps par l’informatique, le courrier
électronique, qui rend les meilleurs lettrés
dyslexiques et dysorthographiques - cf. les fautes
de grammaire et d’orthographe, les contresens,
dans la presse, les sous-titrages TV etc. -, les
“Face”, les ”Twitt.. ”,
SMS, MMS, “flash”, “audio”...
la mondialisation des pillages, des calques et
des “couper-coller”, est : quand,
autrement que par automatismes, les utilisateurs
de tous âges et toutes conditions pensent-ils, à la verticale, si j’ose dire, au sens économique du terme ?
Vertical/e
• Qui suit la direction de la pesanteur
du fil à plomb en un lieu ; perpendiculaire
à un plan horizontal. Fig. Écon. Tous les stades d’une fabrication,
de la matière première au produit
fini.
Petit Robert
Face au déferlement
de slogans terminologiques assenés par
les médias, empruntés à la
psychiatrie et à la psychanalyse, et véhiculés
comme des insultes aussi bien dans le privé
que dans le public, nous serions curieux de savoir
ce que les locuteurs entendent par : hystérique,
schizophrène, fantasme - rappelons qu’un fantasme est toujours sexuel
-, paranoïaque, concept
etc. etc. etc.
Serait-ce
paraître inculte, par respect pour ceux
qui souffrent réellement de pathologies invalidantes, ambulants ou internés,
de remettre ces vocables nosographiques à
leur place et de dire, par exemple : agité
- ou allumé -, ambivalent, pervers
- “la main droite ignore ce que fait
la main gauche”, “pas vu, pas pris”
-, mégalomane - la mégalomanie
ou folie des grandeurs, sournoisement tapie,
guettant chacun de ceux et celles investis d’un
quelconque pouvoir, réel ou auto-représenté comme tel -, chimère,
mirage, illusion, idée, hypothèse
?
Et “décomplexé” qu’est que cela signifie ? Jusqu’à présent,
tous les précédents chefs d’État
étaient-ils donc complexés ?
Même quand
il s’agit de simple technique, le pédantisme
veut que l’on parle aujourd’hui de technologie,
les épisodes sont devenus des saisons...
et autre vocabulaire abscons, ampoulé,
obscurantiste, tiré de la linguistique, imposé, sans aucune
respect pour les critiques pertinentes des enseignants,
aux élèves des écoles primaires
qui, n’y comprenant rien, ne pourront acquérir
le goût et le plaisir de la langue.
Quant aux comportements,
à l’aspect confusion politique des genres,
c’est la foire d’empoigne. Besson déclare
qu’il a demandé conseil à des intellectuels
pour élaborer son “Identité
Nationale”. Lesquels ? En tous cas, bravo pour celui qui a sorti de
son esprit érudit le “conglomérat” que serait la France, histoire d’en finir avec la diversité,
on ne pouvait trouver plus désobligeant,
ainsi qu’en témoigne Proust, cité
par Le Petit Robert,
Les
conglomérats de coteries se défaisaient
et se reformaient.
Ce à quoi
nous assistons, navrés. Les lieutenants
actuels de Martine Aubry la lâcheront tout
sec du jour au lendemain si Dominique Strauss-Kahn,
présumé homme “de gauche”,
postule à la présidentielle de 2012.
Ah ! L’argent, l’argent ! Certes, Strauss-Kahn
est un bon économiste, mais côté
humanisme, intelligence d’autrui et de l’État,
ce n’est vraiment pas Pierre Mendès-France
!
• La burqa
: occupée principalement par ce que j’ai
à faire, mon écoute des grandes
causes nationales est plus que flottante. J’avais
donc pensé que cette polémique relevait
de la sécurité face au terrorisme,
n’importe qui pouvant dissimuler sa personne,
ses intentions, et notamment une bombe, sous cette
vêture !
• Le
chômage qui menace de devenir endémique
: les dégâts qu’il entraîne
ne conduisent pas seulement à la misère
matérielle, indécente, ils détruisent
du même coup le psychisme humain, le repoussent
dans une sorte d’innommable quart-monde spirituel.
Nous pouvons assister quotidiennement à
l’effondrement psychique de nos contemporains,
lequel atteint sans discrimination - positive
! - les esprits
les plus éminents, dès lors qu’ils
sont mis de force à la retraite ou licenciés,
qu’on ne leur demande plus rien, que l’on bafoue
leur narcissisme vital en les réduisant
à la non-existence. On ne peut pas attendre
de l’exclu qu’il “fasse le deuil”
de lui-même, d’ailleurs on ne l’exige même
pas, tout le monde s’en fout !
• “Faire
son deuil” : expression assez consternante,
reliquat de la contestable psychologie du XIXe
siècle. On peut, nous y sommes tenus pour
vivre, rester en bonne santé et ne pas
chuter dans la mélancolie, “faire
le deuil” d’un amour ou d’une amitié
écroulés en les authentifiant par
une rupture, faire le deuil de sa jeunesse en
allée, des illusions perdues - ce qui est
une tautologie -, mais aucunement des morts que
l’on a aimés, de la parentèle assassinée,
pas plus que de soi-même, les seuls qui
témoignent du contraire sont les suicidaires.
On fait avec, on fait sans.
• Une forme
de violence. Dans le livre d’entretien entre Élisabeth
Lévy et Robert Ménard, Les Français
sont-ils antisémites, Élisabeth Lévy laisse passer sans moufter
le propos de Robert Ménard sur ce qu’il
reprend avec appétence comme étant
“les crimes de guerre israéliens”
lors de l’opération “Plomb durci”
- quel vocable ! qui semblerait avoir été
suivi de celui de “Nuage d’automne”
! Pourquoi pas “Vent Printanier”,
pendant que nous y sommes ! - sur Gaza. Il faut
se rendre sur place, et y retourner au cours des
ans, parler et reparler avec les Israéliens,
pour refuser d’entériner une pareille sottise.
À ma connaissance, depuis Arafat en tous
cas, les terroristes, leurs chefs en tête,
se planquent de préférence dans
les maisons et édifices privés,
civils, dans des écoles et des hôpitaux,
plutôt que se poster, courageusement, dans
un bastion militaire identifiable par l’armée
adverse. Les roquettes Qassam et autres Katioucha
ne cessent d’être lancés sur les
populations civiles israéliennes, quels
que soient les efforts de paix, de trêve,
des gouvernements Israélien et du Fatah.
Les Israéliens, des générations
de mères en premier lieu, en ont marre
que ça dure sans que rien ni personne ne
puisse arrêter cette haine brute, tueuse,
à leur égard depuis un demi-siècle,
ils sont excédés, exténués,
et chacun sait, pour soi-même d’abord, que
la violence d’autrui provoque la violence en soi,
même chez les hommes les plus pacifiques.
Sauf chez les masochistes, il y en a.
• Il
est très étrange de devoir se dire
que, comme cela se passe aujourd’hui à
la suite du tremblement de terre en Haïti,
la solidarité humaine se manifeste massivement
quand il s’agit de catastrophes dites naturelles (séismes, tsunami... ). Par
contre, devant les massacres entre humains,
la solidarité ne semblerait pas concerner
grand monde.
On peut d’ores
et déjà douter de l’aide suivie,
attentive, désintéressée, humaine, solidaire auprès de la population Haïtienne
elle-même, qui succèdera à
la destruction de l’île car, s’il existe
véritablement quelques institutions bénévoles
solides, le bénévolat - “vouloir
le bien” -, pour le peu que j’aie croisé
auprès d’adeptes, s’apparente plutôt
à une “amusing therapy” individuelle
de source confessionnelle, en vue de garantir
sa conscience. Sur ce terrain du bénévolat,
dans l’action, se rencontrent surtout des représentants
de l’“entre-soi”, genre réunions
“Tupperware”, mais sans gains éventuels
à l’horizon, autres que l’ajout, sur son
carnet d’adresses, de noms de VIP ou d’un peu
moins VIP.
Voilà pour
la xénophobie, la violence et leurs extensions.
ø
Pour en revenir
à l’évolution des concepts freudiens,
j’ai essayé, depuis plus de quarante ans,
d’approcher, à la lumière, si j’ose
dire, de l’Histoire, de mon histoire, la question
de la structure œdipienne qui, selon ma réflexion,
n’a pas pu prendre forme chez les enfants juifs
nés en France dans la terreur pendant l’Occupation - il y en a très peu -, planqués
dans des lieux successifs plus ou moins sûrs,
trimballés en fuite permanente - je me
souviens encore d’heures et d’heures passées
dans un wagon de chemin de fer militaire à
l’arrêt au beau milieu de nulle part en
rase campagne gelée... L’impossibilité
pour l’enfant de s’éveiller au monde extérieur
par étapes, aux identifications de se construire,
au langage de s’apprendre - nous ne sommes naturellement
pas allés à l’école maternelle
- font que les conséquences de ce phénomène
sont difficilement analysables selon des grilles
d’interprétations psychologiques pré-formatées
au XIXe siècle.
Depuis lors, avec
un mépris consensuel pour la psychanalyse
que nous avons dû entreprendre pour nous
sauver du suicide - pas tous hélas, loin
de là -, comprendre ce qu’est un trauma
et le dominer, on continue de regarder les vieux
enfants de déportés non revenus
que nous sommes aujourd’hui, y compris ceux et
celles ayant acquitté leur dette envers
la psychanalyse en devenant psychanalystes, avec
un apitoiement sordide, comme des débiles
mentaux et autres délicatesses humaines.
Bref, mon hypothèse
sur la faille œdipienne n’a intéressé
personne.
M. W.
24 janvier 2010
ø